LA MAISON DES STROUMPHES

Mes vacances scolaires commencent tout juste qu'il faut déjà que je mette le réveil pour notre rendez-vous à la mairie de proximité. Merci pour la grasse mat ! En même temps je sais qu'il va falloir que je revois considérablement mon rythme de sommeil en le fractionnant progressivement à des sessions de 30 minutes grand max pour être fin prêt lorsque bébé arrivera ! C'est donc la méga tête dans le cul que nous allons procéder à l'inscription de notre foetus à la crèche. Eh oui, pour tenter de caresser l'espoir d'obtenir une place dans ce centre SPA pour bébé, il faut se faire connaître dès le troisième mois de grossesse pour passer en commission sept mois après et éventuellement obtenir le sésame du premier coup, ce qui en terme de probabilité revient à gagner la super gagnotte du loto... J'ai l'impression d'avoir voyagé dans le temps et de me retrouver dans les bureaux du Parti, en Union Soviétique, pour commander une Lada flambant neuve !
Ma femme, elle, est toute chamboulée, elle ne veut pas abandonner son bébé alors qu'il est encore dans son ventre.
"Mais tu te rends pas compte...il sera encore minuscule, tout fragile, c'est inhumain !!! Snif, snif.."
Un couple sort du bureau, une jeune femme et un jeune homme qui lui emboîte le pas, les cheveux tout ébouriffés genre coupe oreiller du matin, l'air complètement ahuri comme s'il venait de comprendre instantanément dans quel engrenage il avait fourré ses pattes. Je ne peux m'empêcher, dans un esprit de compétition purement masculin, de me dire que ces blaireaux, avec leur dossier au dessus du notre, obtiendront peut être la dernière place de crèche...salauds !
On nous accueille finalement, avant que Madame n'ait eu le temps de prendre ses jambes à son coup en criant comme une furie "c'est inhumaaaiiin !!!".
L'employé du service, une gentille dame tout sourire, revoit avec nous les papiers que nous avions à remplir et se rend compte que nous avons peu d'information tangible à lui communiquer. En effet, je ne connaîtrai mon emploi du temps pour la rentrée scolaire prochaine qu'au mois de septembre et cela conditionnera forcément le nombre de jours de garde et les horaires...trop dur d'être fonctionnaire !
Elle nous rassure et nous dit qu'on pourra moduler plus tard et qu'il est préférable pour le moment de voir large. Elle procède ensuite à l'enregistrement de nos identités sur leur base de données en relation avec la CAF. La dame nous demande :
"C'est votre premier enfant ? Vous n'avez pas de dossier chez nous ???"
"Pas que je sache !". Mon humour douteux a encore frappé...
Ma femme donne toutes les informations la concernant avec une rigueur toute scolaire.
Mon tour arrive et contre toute attente, elle me dit :
"Ah, vous êtes déjà enregistré dans notre base de données..."
Un petit malaise s'installe sur son visage alors que je ne comprends toujours pas ce que cela implique avant de me tourner vers Madame qui me fusille du regard...
"Tu as quelque chose à m'annoncer ?" me lance-t-elle en riant jaune.
"Bah...non...je comprends pas..."
La dame poursuit en me demandant de confirmer l'adresse et le numéro de téléphone qui apparaissent à l'écran.
Ma femme souffle et respire à nouveau après une apnée de 30 secondes.
"Je sais..." me dit-elle, "Ce sont les informations pour aller chercher Taïna à la crèche (Taïna est ma filleule !), tu les avais donné à Aurélie pour leur inscription."
OUF, je peux arrêter de me torturer l'esprit à savoir si j'avais déjà craqué une capote avant que je ne connaisse Madame !